« La proche aidance s’est imposée par la porte sans demander la permission, je n’ai pas eu le choix »
Dominique, proche aidante de son conjoint : Automne 2023
Découvrez le récit de proche aidante de Dominique : même si son parcours d’aidante a commencé de manière aussi inattendue et abrupte, il aura su la guider vers de nouvelles ambitions, où le sens du collectif illumine son chemin.
Dominique, 71 ans, est née en Belgique où elle pratiquait le métier d’ergothérapeute en psychiatrie. À 24 ans, elle a immigré au Québec dans les belles années 1970. Ce changement de pays s’est aussi accompagné d’un changement de carrière vers le théâtre et, plus tard, le théâtre communautaire. Depuis plus de 40 ans, ce métier lui permet de créer en plus de tisser des liens serrés avec les communautés.
Il y a 5 ans, sa vie a basculé alors que son conjoint Pierre, avec qui elle partage sa vie depuis 33 ans, a reçu un diagnostic de la maladie d’Alzheimer. « La proche aidance s’est imposée par la porte sans demander la permission, je n’ai pas eu le choix », dit-elle. Dans les mots de Dominique, l’arrivée de la proche aidance dans son existence a eu l’effet d’un « château de cartes qui s’écroule ». Elle, qui était une femme indépendante, dans sa vie comme dans son couple, a dû mettre de côté ses plans et ses rêves pour se reconstruire une nouvelle vie. Toutefois, deux cartes sont restées en équilibre et lui permettent de continuer en tant que proche aidante : celles de la création et celle de l’amour.
C'est ainsi que Dominique a poursuivi sa vie d'artiste communautaire en mettant sur pied, Les Allumettes, un groupe de création qui réunit, depuis deux ans, dix personnes proches aidantes. Lors des rencontres, les membres du groupe créent, se soutiennent et rient beaucoup. En plus, Dominique est conteuse et raconte son expérience vécue de proche aidante à travers trois personnages animaliers dans Les Craquelins, un conte à la fois intime et politique. En ce qui a trait à son amour pour Pierre, il s’est intensifié au travers de la proche aidance et sa relation de couple est devenue plus complice, voire symbiotique.
Dominique rêve d’ailleurs d’un milieu de vie pour les personnes proches aidantes et leur proche où elle pourrait continuer d’accompagner celui qu’elle aime dans un esprit de communauté. Elle déplore le manque d’alternatives en hébergement pour les personnes en perte d’autonomie et le fait que les personnes qui les accompagnent ne puissent généralement pas habiter avec elles.
La proche aidance l'a confronté, plus personnellement et profondément aux injustices du système social. Toutefois, son expérience de proche aidance lui a également donné l’opportunité de développer sa capacité à apprécier l’essentiel, à faire sens de la vie, de la maladie, de la vieillesse, des deuils et de la mort. De plus, elle a appris à devenir plus patiente, ce que son entourage lui fait remarquer!
Pour Dominique, chaque personne est différente et a des besoins distincts. Lorsqu’on lui demande quel conseil elle donnerait à une personne qui débute son parcours de proche aidance, elle répond : « ne pas trop écouter les conseils, s’écouter plutôt soi-même! » D'ailleurs, son conte Les Craquelins, se termine ainsi :
« (…) Je ne sais toujours pas reconnaitre les champignons sauvages et je ne ferai jamais le tour du Guatemala. Mais je découvre chaque jour un peu plus un nouveau pays, étrange et fragile, un monde qui avance à reculons. Ma boussole ne fonctionne plus. Je navigue à l'aveugle, j'ai le vertige, j'ai peur. Mais je ne coule pas. C'est fou quand même toute la force qu'on a en soi ».